Depuis 2006, près de 30 millions d’hectares de terres africaines ont été acquis par des investisseurs pour des projets supérieurs à 1000 hectares, auxquels s’ajoutent les acquisitions à plus petite échelle, souvent le fait d'investisseurs nationaux. Du fait de l'expropriation des utilisateurs, la souveraineté alimentaire et les conditions de vie des populations locales sont menacées. Les grandes monocultures industrielles installées endommagent les ressources naturelles. Et par conséquent, la paix sociale est aussi mise à mal.
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L'accaparement des terres consiste en un transfert massif de terres des communautés locales vers un individu, un gouvernement et/ou des entreprises pour des intérêts locaux ou étrangers. Ce phénomène n'est pas nouveau, par contre l'ampleur s'est accélérée depuis 2005. Et l'intérêt croissant pour la valeur marchande des ressources de la terre va s'accroître encore, renforcant ce phénomène d'acquisition des terres.
Ces acquisitions, en nombre et en taille croissants, concernent les terres cultivables, les forêts et l’eau, pour divers secteurs d’investissement : agriculture (production d’agrocarburants et production de cultures d'exportation), tourisme et mines essentiellement, mais aussi spéculation financière et marché du carbone.
"L'accaparement des terres» se fait par l'intermédiaire de location, de concession ou de l'achat pur et simple pour le compte de gouvernements ou d'entreprises (nationales ou érangères) et souvent pour du long terme allant de 30 à 99 ans. Ces acquisitions, souvent illégitimes même si légales, entraînent des conséquences négatives qui menacent la vie des communautés africaines, en particulier par le déplacement de populations, l'aggravation de la pauvreté et de la faim, l’augmentation des conflits, la perte des droits fonciers et des moyens de subsistance, la remise en cause de la souveraineté alimentaire, et l’irréversible dégradation de l'environnement. Elles sont une violation des droits de l'homme et du droit de toutes les familles d'agriculteurs de disposer de la terre pour vivre dans la dignité.
Ce phénomène représente 50 millions d’ha pour l'Afrique, l'Asie et l'Amérique latine réunis. (source: Banque Mondiale)
35 % des projets d'investissement en terres concernent les agrocarburants (source: Banque Mondiale)
NB: Nous employons le terme «communautés locales» pour désigner les petits agriculteurs et l’agriculture familiale, les éleveurs, les pêcheurs et les groupes autochtones.
Conséquences pour les Africains
Quand les Africains perdent leurs terres, ils perdent également l'accès à l'eau. Et en cas cas de la pollution par les pesticides utilisés dans les cultures, puis qui s'infiltrent dans les eaux souterraines ou rejoignent indirectement la rivière, la qualité de l'eau est affectée. Les gens perdent aussi l'accès aux ressources liées à la terre perdue: zones pour la culture, le pâturage, la pêche, la chasse, la cueillette (plantes, noix, fruits, miel et autres denrées), les zones de collecte de bois de chauffage et de matériaux pour diverses activités. Lorsque les villageois sont déplacés, le plus souvent, ils sont déplacés à des endroits loin des services publics: routes, eau, écoles, centres de santé etc. Ils perdent des terres fertiles et bien irriguées. En étant déplaçés dans un autre endroit, ils entrent en concurrence avec des personnes déjà établies. Ainsi le déplacement de personnes et d'activités engendre des conflits pour la terre et par là, menace la sécurité.
Certains nouveaux projets de cultures mécanisée à grande échelle installent une concurrence inégale pour l'eau dans les régions où les agriculteurs sont à court d'eau et où les personnes manquent d'eau propre. Lorsqu'il y a compensation, elle couvre rarement la véritable valeur des pertes de sources de revenus et de moyens pour des activités.
Souvent, les populations locales sont privées de leur souveraineté alimentaire. Mais les autorités cherchent rarement à consulter prélablement et à obtenir le consentement libre et préalable des citoyens pour la prise de décision. Or les personnes les plus touchées ont intérêt à prendre les meilleures décisions sur une question aussi vitale que la terre.
De plus, le système de l'agriculture familiale, principale source de nourriture et de revenus dans les pays africains, est grandement menacée par l'accaparement des terres et par la production contractuelle qui est parfois proposée comme une solution gagnant-gagnant. Dans les faits, l'agriculture contractuelle conduit les gens à porter une grande part des risques et à réduire leur propre production alimentaire en faveur des cultures de rente. Souvent elle impose des procédés techniques qui ressemblent à ceux de l'agriculture industrielle.
Enfin, en perdant la terre, les Africains perdent la terre des ancêtres et aussi des lieux spirituels.
Données mondiales d'accaparement de terre
Un ensemble de données qui recensent plus de 400 accaparements globaux de terres est publié par l'organisation GRAIN.
Depuis le 23 février 2012, GRAIN rend disponible un nouvel ensemble de données qui recensent 416 accaparements de terres récents à grande échelle par des investisseurs étrangers pour la production de denrées alimentaires. Les cas couvrent près de 35 millions d’hectares de terre dans 66 pays. L’Afrique est la cible principale des accaparements de terres.
http://www.grain.org/fr/article/entries/4479-grain-releases-data-set-with-over-400-global-land-grabs (uniquement en anglais)
Impacts d'entreprise de l'UE ayant investi dans de grandes étendues de terre en Afrique
Quelques exemples d'impacts socio-économiques occasionnés par des investissements en cultures pour agrocarburant à grande échelle en Afrique:
00 110301 Table of impacts of EU agrofuels companies in Africa by AEFJN.pdf (157.8 kB)