APE Etat des négociations - Avril 2010

 

En 2002, l'UE a commencé les négociations pour les accords de partenariat économique (APE) avec les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). A ce jour, seul l'APE final APE CARIFORUM (qui touche les pays des Caraïbes) a été ratifié. A ce jour aussi, 20 pays africains ont entrepris ou signé des APE intérimaires.

 

Après avoir été ralenties en automne dernier, les négociations APE ont repris avec une nouvelle énergie ces dernières semaines depuis que la nouvelle Commission est entrée en fonction en février dernier. Le nouveau Commissaire au Commerce, Karel de Gucht; a dit récemment avoir des problèmes pour comprendre pourquoi la plupart des pays africains ont continueé à s'opposer à la signature des APE. De Gucht a accuse les pays africains d'utiliser un double jeu de normes en dénonçant d'une part l' APE  et en ayant accès au marché européen par des mécanismes de 'sans taxe" et de quota illimités.

 

Afrique orientale et australe (ESA)

 

Maurice, les Seychelles, le Zimbabwe et Madagascar ont signé les APE intérimaires avec l'UE en septembre dernier. Les deux autres membres de ce groupe, la, Zambie et les Comores, ont decidé de ne pas signer. Comme les deux pays sont dans la catégorie des nations les moins développées (NMD), ils bénéficient de l'accord de l'UE « Tout sauf les Armes » (TSA). Leur refus de signer les APE intérimaires sera sans conséquence pratique pour eux.

 

Le Commissaire EU au Commerce Karel de Gucht envisage de rencontrer prochainement le ministre du commerce de Zambie pour redonner vie aux pourparlers sur les APE mis en veilleuse.

 

Afrique orientale (EAC)

 

Les négociations sont en très bonne voie et l'Europe espérait pouvoir signer l'accord en mai prochain. Les Africains ont refroidi ces espoirs. L'expert rwandais en commerce, John Bosco Kanyangoga voit plutôt la date de décembre pour la finalisation des accords.

 

Quelques questions doivent encore être étudiées , Stephen Mbithi, Président de l'Association kényane des Exportateurs de produits  et membre de l'équipe des négociateurs a annoncé que les parties s'étaient mises d'accord sur une matrice EAC-APE - Développement et que la discussion porte sur le fait d'intégrer cela à l'accord ou de l'y annexer.

 

L'UE s'oppose au caractère légalement contraignant, et assure qu'il y a d'autres canaux par lesquels les fonds peuvent être octroyés à la région. La commission européenne (CE) a pourtant demandé aux pays d'Afrique orientale de préparer une liste des projets et programmes prioritaires et qui ont besoin de fonds qui leur sont alloués pour être approuvés.

Mbithi a ajouté que la clause des pays les plus favorisés(MFN Most Favoured Nations) doit aussi être définie pour empêcher que la région ne soit forcée de s'approvisionner auprès de l'UE pour les biens et les services quand elle peut les obtenir à meilleur prix dans d'autres régions, comme la Chine.

 

Le Secrétaire permanent kenyan de l'EAC, David Nalo a démenti certains rapports récents des medias en disant que le Kenya, seul pays  en dehors de la liste des pays les moins développés(NMD) a indiqué" qu'il le ferait seul, car le marché régional est une priorité plus importante pour le Kenya.

 

En même temps, l'ancien président tanzanien Benjamin Mkapa a averti les pays d'Afrique orientale de se méfier des APE autre forme de colonisation européenne. Il a décrit l' APE, super protégé par l'Europe de pouvoir être une nouvelle ruée vers l'Afrique, et de provoquer un appauvrissement économique de la région. Cette crainte est partagée par la Tanzanie Civil Society Trade Coalition (TCSTC).

 

Afrique occidentale (CEDEAO)

 

Parmi les 16 pays de la CEDEAO, 13 sont des NMD qui bénéficient de TSA. Seule la Côte d'Ivoire, un des 3 pays non NMD, a signé l'accord intérimaire avec l'UE tandis que le Ghana a entrepris les négociations mais n'a pas encore signé. Le Nigeria, pays riche en pétrole, n'a jamais manifesté son intérêt dans la signature d'un APE et n'a pas pris part aux négociations. Le Nigeria est donc automatiquement retombé dans le Système généralisé de Préférences (SGP).[1]  Le désaccord, entre l'UE et la CEDEAO dure depuis longtemps et se maintient.

 

Lors de la réunion du 22-26 Mars à Bruxelles, la CEDEAO a présenté une nouvelle offre d'accès au commerce qui ouvrirait jusqu'à 70 pour cent des tarifs douaniers et du volume commercialisé et ce sur une période de 25 ans. Les dirigeants de l'UE ont pris note de la proposition mais ils ont aussi dit qu'ils comptaient voir les tarifs diminuer plus rapidement.

 

Entre-temps, l'UE et la CEDEAO restent dans une impasse quant à la clause des pays les plus favorisés (MFN). L'UE promeut une clause MFN dans l'APE qui assurerait le même traitement que celui offert par les pays de la CEDEAO à des partenaires commerciaux majeurs dans d'autres FTA.

 

La CEDEAO est mal à l'aise avec cette proposition de clause car elle craint que cela ne diminue la capacité des pays d'Afrique occidentale d'établir des accords avec des pays en développement importants. La proposition de l'UE envisage ainsi que toute préférence commerciale établie entre un pays de l'Afrique occidentale et la Chine devrait aussi être établie avec l'UE. La CEDEAO veut limiter la clause MFN aux seuls pays développés.

 

La CEDEAO pousse aussi pour que l'UE supprime les subsides agricoles qui d'après elle ont un effet néfaste sur les agriculteurs d'Afrique occidentale. L'UE dit quand même qu'il n'y a plus beaucoup de place pour des concessions supplémentaires sur les subsides agricoles au sein de négociations de l'OMC. A la réunion tenue à Bruxelles, les parties se sont mises d'accord sur un groupe de travail qui analyserait l'impact économique des subsides européens à l'agriculture sur l'Afrique occidentale.

 

Les dates des prochaines négociations n'ont pas encore été fixées.

 

Afrique australe (SADC)

 

En Juin 2009 le Botswana, Lesotho, Mozambique et Swaziland ont signé un APE intérimaire avec l'UE. L'Afrique du Sud, la Namibie ainsi que l'Angola n'ont pas signé. La Namibie est le pays le plus vulnérable parmi les trois non signataires de l'accord. L'Angola comme NMD bénéficie de l'accès libre au marché européen, grâce au programme TSA, tandis que l'Afrique du Sud bénéficie de tarifs préférentiels en vertu d'un accord de libre-échange avec l'UE.

 

L'UE augmente donc la pression sur la Namibie. Mais la Namibie ne semble pas près de céder.L e délégué de la commission, européenne en Namibie, Elizabeth Pape, ne croit pas que le gouvernement namibien va signer un APE Elle a souligné que la poursuite du status quo n'est pas une  solution', car il faut normalement que quelque chose soit mis en place avant la fin de 2010 pour apporter une solution à des problèmes majeurs. La déléguée CE déclare que la CE a sans cesse assuré la Namibie de son engagement à honorer les textes acceptés à Swakopmund pour l'Ape final. Mais le gouvernement namibien prétend que lors des négociations suivantes de mars 2009 à Swakopmund 'l'UE a promis de se pencher sur les inquiétudes de la Namibie, telle la protection des industries naissantes, la sécurité alimentaire et les taxes à l'exportation. A ce jour, aucune assurance écrite n'a été reçue qui montrerait comment des clauses pour la gestion de ces questions sont envisagées au sein de l'IEPA et ce avant la signature

 

Un nouveau tour de négociations est prévu à Bruxelles les 27-29 avril prochains.

 

Afrique centrale (CEMAC)

 

Le Cameroun est le seul pays de cette région à avoir signé un APE intérimaire. Le Cameroun était supposé mettre en application l'APE intérimaire - en janvier 2010, mais le gouvernement a décidé de retarder cela.  En février les gouvernements d'Afrique centrale ont accepté d'ouvrir 60% de leurs marchés sur plus de 20 ans. La proposition est acceptée comme réaliste vu les différences de développement entre cette région et l'UE. On peut pourtant douter que la Commission européenne soit satisfaite de cette proposition.

 

 

 

Thomas Lazzeri

 


[1] Le Système de préférences généralisées est un accord commercial par lequel l'UE fournit un accès préférentiel au marché de l'UE pour les pays en développement, sous la forme de tarifs réduits pour leurs produits lors de l'entrée dans le marché de l'UE. Il n'y a pas d'attente ou exigence que cet accès soit réciproque. Il faut toutefois noter que cela représente une augmentation de tarifs pour les pays ACP, qui jusqu'à présent bénéficié de l'accès en franchise de droits au marché de l'UE grâce à la Convention de Lomé.

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