Nouvelles Commerce - Février 2011
Comme il y a eu peu de mouvement pour la question des APE (accords de partenariat économique) au cours des derniers mois, cette mise à jour se focalisera plus généralement sur la politique du commerce et pas uniquement sur les APE.
Le Ghana a annoncé qu'il signerait son APE provisoire avec l'UE; il l'avait commencé l'APE en 2007 mais ne l'avait jamais signé, à cause du manque de progrès dans la négociation d'un APE régional pour la région d'Afrique occidentale (CEDEAO). Le Ghana n'a pas indiqué plus spécifiquement quand il signerait l'APE. Cette histoire présente deux faces de la médaille. D'une part, c'est une bonne nouvelle car elle montre que les négociations pour un APE régional n'avancent pas et que les pays de la CEDEAO résistent à la pression exercée par l'UE pour qu'ils se hâtent d'entrer dans des transactions commerciales, qui risquent de leur nuire à l'avenir. D'autre part, cela montre aussi la pression à laquelle font face des pays africains qui ne sont pas les moins avancés, comme le Ghana. Les PMA (pays les moins avancés) bénéficient déjà du schéma "tout sauf les armes" de la Commission européenne, qui leur permet d'exporter vers l'Union Européenne sans payer de droits ni être soumis à des quotas.
Au contraire, les pays qui ne sont pas des PMA ont à craindre que l'Union Européenne mette fin à leur accès libre de droits au marché européen et qu'elle leur impose des droits de douane. C'était la seule raison pour laquelle le Ghana a commencé l'accord provisoire de partenariat économique, qu'il n'aimait pas. La Côte d'Ivoire, un autre pays non PMA de la région a déjà signé son accord provisoire de partenariat économique en novembre 2008, tandis que le Nigeria riche en pétrole a refusé les APE et s'est vu imposer des droits de douane sur ses exportations sous le schéma de système généralisé de préférences[1]. Tous les treize autres pays de la région CEDEAO sont des PMA et, par conséquent, ne doivent pas s'inquiéter de la perte de l'accès au marché européen.
Dans une lettre ouverte publiée plus tôt ce mois, les ministres du commerce de France, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne, du Portugal et de l'Espagne en ont appelé à une politique européenne de commerce "moins naïve" et capable d'assurer "une défense plus efficace et plus stratégique" des intérêts européens. "Nos priorités doivent concerner l'accès au marché pour les biens, les services, l'investissement, l'acquisition publique, la protection de la propriété intellectuelle, l'approvisionnement en ressources naturelles et la libéralisation du commerce en relation avec le climat", disent les ministres. En d'autres termes, ces ministres du commerce demandent à la Commission Européenne de poursuivre son agenda néolibéral de commerce libre d'une manière encore plus agressive et de se focaliser avec un esprit encore plus étroit sur les intérêts commerciaux européens, sans aucune considération pour l'impact de la politique commerciale européenne sur les personnes qui vivent dans des pays tiers.
A Genève, des négociations ont eu lieu pour relancer le Cycle de Doha, qui s'éteignait, à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'UE a exprimé son espoir que les négociations pourront être conclues pour la fin de cette année. Cependant, l'optimisme de l'UE ne semble pas être soutenu par des faits concrets. L'UE elle-même a dû admettre que, jusqu'à présent, il n'y a pas eu de progrès sur les questions litigieuses, qui avaient causé l'arrêt. Les Etats-Unis, d'un côté, et les pays en voie de développement, de l'autre, restent aussi éloignés qu'avant. Il est aussi extrêmement improbable que les Etats-Unis soient disposés à faire aucune concession supplémentaire qui pourrait être perçue par le public américain comme heurtant les intérêts américains, spécialement si près de la prochaine élection présidentielle.
Thomas Lazzeri
[1] Les Système généralisé de préférences est un arrangement commercial par lequel l'UE offre un accès préférentiel au marché de l'UE à des pays et territoires en voie de développement, sous la forme de droits de douane réduits pour leurs biens lorsqu'ils entrent dans le marché de l'UE. On n'attend ni n'exige pas que cet accès soit réciproque. Il faut cependant noter que ceci représente une augmentation des droits de douane pour les pays ACP, qui jusqu'ici avaient un accès libre de droits au marché de l'UE.