Espérance de l’Afrique et nouvelles voies du commerce international

Actuellement, les accords commerciaux entre l’Afrique et l’Europe sont conditionnés par des politiques économiques néolibérales qui laissent peu d’espace à une croissance économique plus juste en Afrique. L’Europe, une fois de plus, impose ses modèles économiques et politiques aux régions africaines et réclame le libre-échange des biens, services et investissements. De plus, le système néolibéral promeut la compétition entre les pays et compromet le développement de beaucoup de pays africains.
Malgré la croissance économique africaine de la dernière décennie, l’industrie africaine, à ses débuts et limitée, n’est pas préparée à entrer en compétition avec des sociétés européennes. Dans ces circonstances, des accords de libre-échange entre l’Afrique et l’Europe génèrent une perte d’emplois et l’appauvrissement de la population en Afrique. En même temps, les pays africains souffrent de la pression d’organisations économiques internationales telles que le Fonds Monétaire International (FMI), la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), qui exigent des pays en voie de développement l’application de règles néolibérales s’ils veulent recevoir une aide au développement et des prêts. D’autre part, de nouveaux accords sont proposés pour établir un nouveau système économique aussi bien que de nouvelles manières de faire du commerce entre pays développés et en voie de développement.
Le ‘Mandat commercial alternatif’ (Alternative Trade Mandate [ATM]) est un réseau de 50 organisations qui ont pour objectif de changer la politique commerciale européenne de sorte qu’elle travaille pour les personnes et pour la planète, au lieu de servir les intérêts des principales sociétés commerciales.
ATM propose une politique commerciale alternative qui augmente globalement le bien-être économique, social et environnemental et qui crée la justice entre pays, classes sociales et communautés locales. Ce nouveau système commercial donne priorité aux personnes sur les intérêts des sociétés et il essaie d’atteindre ses objectifs en établissant des priorités qui doivent être respectées aux niveaux international, national et local.
Au niveau international, chaque accord commercial doit garantir le respect des droits humains de ceux qui sont affectés par l’accord. Les nouveaux accords économiques doivent assurer une croissance économique durable, respectueuse de l’environnement et des conditions de travail, en forçant les entreprises à respecter les droits et normes socio-économiques et environnementaux. Les accords commerciaux internationaux doivent être encadrés par les règles de transparence et d’équité qui doivent être exigées dans les négociations entre l’UE et les régions africaines.
En Europe, l’UE a les compétences pour négocier des accords commerciaux et, une fois les nouveaux accords adoptés, les états membres doivent adapter leur législation. Les différents gouvernements doivent prendre des mesures en vue de faire valoir les droits économiques, sociaux et culturels tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de leurs frontières. Les états membres de l’UE devraient avoir la responsabilité extraterritoriale du comportement de leurs sociétés qui travaillent à l’étranger, en ce qui concerne les droits humains et environnementaux.
Les états membres de l’UE doivent reconnaître le droit des Africains à décider leurs propres politiques commerciales. Les gouvernements africains devraient être libres d’établir des mesures protectionnistes pour leurs entreprises et pour le contrôle des réglementations financières dans leurs propres pays. La libéralisation du marché ne peut pas être imposée par l’Europe et les pays riches. Le bien-être de la population doit toujours être au centre des négociations.
Les gouvernements africains ont le droit d’être indépendants et de résoudre les conflits potentiels entre les intérêts des entreprises et les droits de la population qui pourraient survenir sur leurs territoires. Dans de nombreux cas, les pays développés imposent des tribunaux internationaux pour résoudre des conflits entre l’intérêt national et les sociétés internationales. Dans de nombreux cas, les gouvernements africains doivent renoncer à leur propre législation. Les gouvernements africains ne devraient pas avoir à renoncer à leur propre juridiction pour résoudre des conflits et à leur propre souveraineté pour décider leur législation.
Au niveau régional, les accords commerciaux doivent respecter les intérêts des communautés locales, et des études d’impact devraient être réalisées pour protéger leur environnement et les produits domestiques. Les accords commerciaux doivent protéger les besoins fondamentaux de la population et garantir son bien-être en termes de santé publique, d’éducation et de conditions de travail. Les populations africaines ont le droit de vivre dans la dignité et elles doivent être entendues et représentées dans les négociations avec d’autres pays et elles doivent être au centre de tous les accords.
L’ATM revendique une juste distribution des revenus entre travailleurs, producteurs, distributeurs et gouvernements. Tous ceux-ci sont nécessaires dans la chaîne du commerce et leurs intérêts doivent être protégés. Une injustice économique est perpétrée s’il n’y a pas une juste distribution des profits des transactions.
Alors que les accords commerciaux de l’Union Européenne renforcent la libéralisation du marché, poussent à la privatisation des services publics et imposent les intérêts des sociétés transnationales, l’ATM offre une nouvelle alternative de commerce. Les accords commerciaux alternatifs seraient basés sur : la protection de la population de préférence à la libéralisation du marché, le renforcement de la voix des communautés locales, la prévention de la privatisation des services publics, et la défense des droits humains de préférence à tout profit des entreprises. Les pays européens doivent effectuer un déplacement radical de leurs politiques commerciales et d’investissement pour donner un nouvel élan d’espoir à la population africaine.
José Luis Gutierrez Aranda
Conseiller politique d’AEFJN