1311 Le Conseil de sécurité de l’ONU appuie le traité sur le commerce des armes

Photo: AP/Mary Altaffer

Les armes légères et de petit calibre causent des souffrances et pertes de vies importantes à travers le monde et leur existence demeure une grande préoccupation pour tous ceux qui s’intéressent à la paix et qui sont troublés par l’énorme souffrance causée par ces armes. On estime que 875 millions d’armes légères et de petit calibre circulent dans le monde, elles sont produites par plus de 1.000 entreprises dans presque 100 pays. Parmi les exportateurs principaux d’armes légères figurent les Etats-Unis, l’Italie, le Brésil, la Russie, la Chine, et l’Allemagne. La valeur annuelle estimée du marché autorisé dépasse 8,5 milliards de dollars, bien qu’à cause du caractère secret de ce marché, il soit difficile de connaître le montant réel. Il est encore plus difficile de connaître le montant des transferts illicites d’armes légères. Le transfert illicite d’armes légères et de petit calibre, leur accumulation et leur mauvais usage alimentent les conflits armés et exercent un impact négatif sur les droits humains et sur les problèmes humanitaires, de développement et socio-économiques. Les armes légères créent de l’insécurité pour les civils et exercent un impact redoutable sur la vie ordinaire des femmes et des enfants, car elles augmentent les cas de violence perpétrés contre les femmes et les filles, comme dans l’Est de la R.D. du Congo. Elles favorisent aussi le recrutement et l’utilisation d’enfants par différents groupes armés.

 

Les armes légères sont les ‘armes de destruction massive’ de l’Afrique. Elles sont bon marché, faciles à gérer, à se procurer et à emporter. Leur présence massive prolonge les conflits et la souffrance de la population. Les armes légères ont apporté l’instabilité à la région du Sahel, elles ont alimenté l’anarchie en Guinée-Bissau, en Somalie et dans la République centrafricaine ; elles perpétuent l’instabilité et les conflits au Mali et en Côte d’Ivoire et même au large dans l’océan Indien où agissent des navires pirates. Les armes légères sont aussi utilisées par des groupes armés et des terroristes comme Al-Qaeda dans le Maghreb islamique, Boko-Haram au Nigéria et Al-Shabaab en Somalie. Partout les armes légères infligent chaos et destruction aux vies et aux nations et elles minent les efforts de développement.

 

Dans l’histoire du Conseil de Sécurité de l’ONU, il y a peu de documents sur l’impact des armes légères sur les conflits. En 1999 le Conseil a mis les armes légères à son ordre du jour. En mars 2003 le Conseil a voté la Résolution 1467 (2003) sur la prolifération des armes légères et les activités mercenaires. Entre 1999 et 2006 le Conseil a tenu neuf débats sur la question. En 2006 une initiative de l’Argentine pour une résolution du Conseil sur les armes légères a été bloquée par les Etats-Unis. En juin 2007 le Conseil a demandé au Secrétaire général de produire des rapports biennaux sur les armes légères. En mars 2010, sous la présidence du Gabon, le Conseil a débattu sur “Région d’Afrique Centrale : impact du trafic illicite d’armes”. En juin 2011, le Gabon a tenté de commencer un débat sur ‘le trafic de drogues et les armes légères comme menaces à la paix et la sécurité internationales’, mais le débat ne s’est focalisé que sur le trafic de drogues. Comme le Conseil n’avait pas discuté officiellement des armes légères depuis 2008, en avril 2012 le débat sur les armes légères a été effacé de la liste des sujets à l’ordre du jour. En septembre 2013, l’Australie, en s’appuyant sur l’élan vers l’adoption du Traité du commerce des armes de l’ONU (TCA), a amené la question des armes légères au Conseil. La Ministre des Affaires étrangères, Julie Bishop, a présenté l’ébauche de Résolution et l’a défendue avec enthousiasme.

 

En adoptant cette Résolution 2117 (2013), le Conseil de Sécurité de l’ONU a exprimé sa préoccupation du transfert illicite, de l’accumulation et du mauvais usage des armes légères et de petit calibre, qui perpétuent conflit, instabilité et crime dans le monde entier. Quatorze membres sur quinze ont voté en faveur de la résolution et seule la Russie s’est abstenue du fait que la résolution aurait dû contenir des dispositions contre les fournitures illégales d’armes à des groupes non étatiques. Les ministres présents ont remercié Julie Bishop d’avoir choisi la question des armes légères pour le mois de la présidence australienne.

 

Le Secrétaire général Ban Ki-moon a félicité le Conseil pour la décision et il a dit : “Les armes légères sont une source de crises, de conflit et de criminalité... La disponibilité incontrôlée de fusils et de balles menace les processus de paix et les efforts fragiles de réconciliation… Elle mène à un vaste éventail de violations des droits humains, incluant mise à mort et mutilations, viol et autres formes de violence sexuelle, disparitions forcées, torture et recrutement forcé d’enfants par des groupes armés … Elle exacerbe la violence entre communautés et le crime organisé et elle mine notre travail pour la justice sociale, l’Etat de droit et les Objectifs du millénaire pour le développement.” Il ajouta “Le monde est surarmé et la paix est sous-financée.”

 

Parmi les recommandations de la Résolution 2117 (2013) figurent: la bonne gestion des réserves d’armes légères et de leurs munitions ; la nécessité pour les gouvernements de mettre complètement en œuvre les embargos des Nations unies sur les armes et de partager les informations sur les problèmes relatifs à la rupture de l’embargo ; la nécessité de réglementer le courtage pour les armes légères et de coopérer avec les institutions des Nations unies pour empêcher la déviation d’armes légères par l’utilisateur final. Cependant, ce qui est le plus significatif est l’encouragement aux gouvernements pour la prompte signature et la ratification du Traité de commerce des armes (TCA) de 2013.

 

Dans la ligne de la Réglementation 1325 du Conseil de sécurité des Nations unies, la résolution actuelle appelle les états à inclure la participation pleine, efficace et significative des femmes et des organisations féminines à l’élaboration de politiques, à la planification et la mise en œuvre de processus pour combattre et éradiquer le transfert illicite d’armes légères, aussi bien qu’à la planification et la mise en œuvre des programmes de désarmement, démobilisation, réintégration, aussi bien qu’aux efforts de réforme du secteur de la justice et de la sécurité. Elle invite les états et les organisations régionales à s’occuper des besoins particuliers de femmes et des enfants associés aux forces armées et aux groupes armés.

 

La résolution invite les états membres à signer et ratifier le Traité de commerce des armes de l’ONU (TCA) adopté en avril 2013. Le TCA a été signé par 110 états membres et ratifié par 7 pays, sur les 50 nécessaires pour qu’il entre en vigueur.

 

Comme le TCA inclut les armes légères et de petit calibre, y compris les armes à feu possédées par des citoyens pour leur usage personnel, le fort lobby NRA[1] des Etats-Unis essaiera de convaincre le gouvernement de ne pas ratifier le traité qu’il a déjà signé. Les états membres de l’Union Européenne ont besoin du feu vert du Parlement Européen pour commencer les procédures nationales en vue de sa ratification. Cependant, à cause d’un conflit entre les comités parlementaires, le Parlement Européen ne l’a pas approuvé. Ceci peut différer la ratification des 28 états membres et retarder l’entrée en vigueur du TCA.

 

La Résolution est une étape historique pour assurer plus d’attention à tous les niveaux à l’importance d’un contrôle et d’une action fermes au niveau international pour réduire les menaces que le trafic illicite, la prolifération et le mauvais usage des armes légères opposent au maintien de la paix internationale, des droits humains, de la loi humanitaire internationale et de la sécurité humaine.

 

Begoña Iñarra

Secrétaire exécutive d’AEFJN



[1] National Rifle Association (Association nationale des fusils)

 

 

 

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