Lutte contre la prolifération des armes légères en Afrique
Les armes légères constituent l'une des principales causes de décès en Afrique. La présence très répandue et souvent incontrôlée des armes légères dans différentes parties du continent et la possibilité de les acheter et de les utiliser est devenu un vrai fléau.
Les conflits civiles et entre-états stimulent la demande d'armes légères et créent un réservoir d'armes qui peuvent être utilisées pour commettre des crimes violents, ainsi que pour alimenter des conflits. Les armes légères comme les fusils d'assaut sont particulièrement adaptées à la guerre irrégulière parce qu'ils sont bon marché (un AK-47, la machine à tuer favori de l'Afrique peut facilement être acheté pour si peu que 12 $).
La disponibilité d’armes légères n'est pas seulement une cause d'homicides et de blessures, mais aussi d’insécurité, où le développement ne peut pas prospérer et où l'activité économique s'arrête. La perturbation des ressources locales, la mauvaise utilisation des deniers publics et l'imposition de la loi du plus fort accompagnent souvent la prolifération d’armes légères.
Nombreux gouvernements d'Afrique ont signé des accords régionaux sur le contrôle des armes légères. En vertu de ces accords, les gouvernements et la société civile ont joint leurs efforts pour introduire des mécanismes pour stopper l'afflux d'armes à feu.
Pour arrêter le transfert d'armes et leur prolifération en Afrique AEFJN travaille à trois niveaux:
- À l'ONU, vers un Traité Commercial international sur les armements (TCA), fondée sur les principes fondamentaux du droit international, afin de réduire le coût humain de la prolifération des armes, d’éviter que des fournisseurs d'armes peu scrupuleux trouvent le point faible de la chaîne d'approvisionnement, et de s'assurer que tous les exportateurs d'armes sont soumis aux mêmes normes internationales.
- Au niveau européen, l’AEFJN travaille en vue de la stricte application de la Position commune de l’UE sur l'exportation d'armes, des normes de l'UE juridiquement contraignantes, adoptée en 2008. Nous travaillons aussi envers son adoption concrète par tous les États membres de l'UE.
- En Afrique l’AEFJN soutient les accords régionaux pour un meilleur contrôle d’armes à feu.
Les armes légères un danger pour l’Afrique
1. La prolifération des armes légères affecte profondément l’Afrique
Il est frappant de constater comment les régions qui souffrent de conflits endémiques, comme l’Est de la République démocratique du Congo, sont les régions qui possèdent une forte concentration de ressources minérales. Toutefois des conflits de toute sorte ravagent aussi d'autres régions, comme la Somalie et le Darfour. Les motifs à l’origine de ces conflits peuvent être d'ordre économique, ethnique ou politique, mais la présence généralisée d'armes contribue à sa persistance. L'instabilité politique dans certains pays, souvent en raison de la présence de factions armées, empêche la région d'atteindre son développement.
Les armes légères constituent l'une des principales causes de décès en Afrique. La présence très répandue et souvent incontrôlée des armes légères dans différentes parties du continent et la facilité pour les acheter et les utiliser est devenu un vrai fléau. La disponibilité d’armes légères n'est pas seulement la cause de nombreux homicides et blessures, mais aussi de l'insécurité, de l’exploitation des ressources locales et du détournement de l’argent public.
La présence d’armes légères en Afrique affecte la vie et la subsistance de beaucoup de gens ordinaires. Les activités économiques ne peuvent pas s'épanouir lorsque les infrastructures sont perturbées par les conflits et l'éducation formelle devient difficile, voire impossible dans des situations de guerre ou de conflits persistants. Lorsque les armes sont facilement disponibles, la culture de la violence prend racine: tout ce qui est souhaitable peut être obtenu par la menace, le chantage et la force. Ceci s'applique à tout type de marchandises, telles que maisons, bétail, récoltes, et même des cultures saisonnières pour la nourriture des familles. La loi du plus forts l'emporte sur la règle de la justice et des droits fondamentaux. Des réalités telles que la justice, la paix, la sécurité, la démocratie, la stabilité et la croissance économique ne peuvent pas trouver leur chemin et s'affirmer quand les armes sont utilisées pour gagner et obtenir tout ce dont on a envie.
2. Le commerce des armes une activité lucrative
Le commerce des armes est un commerce lucratif qui appuie de nombreuses activités illégales. Les armes facilitent également l'exploitation illicite, le contrôle et la commercialisation de ressources naturelles et de la production des diamants, du cuivre, du coltan, de la cassitérite et de nombreux autres minerais précieux ou stratégiques qui sont des produits d'exportation très rentables. Dans ces cas, les droits fondamentaux sont oubliés ou écrasés. Le phénomène des enfants soldats, avec tout ce qui l’accompagne en est un exemple éloquent.
Beaucoup d’armes qui arrivent illégalement au marché africain sont produites en dehors de l'Afrique.
3. Le 2è Synode africain et le trafic des armes
Le 2è Synode pour l’Afrique s’est centré sur la paix, la réconciliation et la justice. Les évêques ont lancé un appel présent pour que le commerce des armes cesse dans les zones en conflit. Pour les évêques la façon dont les parties en conflit se fournissent en armes dans le marché international est une grande injustice et un vol: les ressources des pays pauvres sont systématiquement pillées pour alimenter le commerce des armes. Ils demandent que la force matérielle des armes soit substituée par la force morale du droit.
Les évêques présents au Synode ont dénoncé la prolifération des armes en Afrique, et ont encouragé les Conférences Épiscopales des pays producteurs d’armes à plaider auprès de leurs gouvernements pour qu’ils promulguent une législation restrictive sur la production et la distribution des armes faites au détriment des peuples des nations africaines.
Les évêques ont accueilli avec joie les initiatives de l’ONU, de l’Union Africaine et des Organisations régionales intergouvernementales comme ECOWAS, Afrique Orientale et Grands Lacs (Protocole de Nairobi) pour faire cesser le trafic illégal des armes et rendre plus transparent son commerce légal. Ils encouragent les gouvernements de l’Afrique à soutenir le Traité sur le Commerce des Armes (ATT) de l’ONU. Ils demandent que ce futur traité soit contraignant et adopte des standards universels qui respectent les droits humains et les lois internationales humanitaires.
4. AEFJN et contrôle des armes
Motivé par la foi chrétienne, AEFJN travaille à la racine des injustices qui affectent les peuples africains. La présence généralisée et le commerce incontrôlé des armes légères constitue un danger pour la stabilité des gouvernements démocratiquement élus, ainsi que pour la croissance de toute activité économique et entrave la voie du développement et du progrès. Ceux qui souffrent le plus de cette situation sont des citoyens ordinaires et en particulier les plus faibles proches.
AEFJN dénonce la complicité entre le commerce des armes et le trafic illicite des êtres humains et des ressources locales.
Nous soulignons la disproportion dans les dépenses publiques de certains pays africains, entre les équipements militaires et les services sociaux.
Nous considérons qu'il est de notre devoir, de faire pression sur l'Union européenne, les pays européens, ainsi que sur l'Organisation des Nations Unies, pour qu’ils adoptent des mesures juridiquement contraignantes visant à contrôler la production et l'exportation des armes légères.
Nous formons des réseaux avec d'autres organisations en Europe et en Afrique afin de soutenir les accords et les mesures prises par les pays africains, tant à niveau régional comme national, afin de contrôler la prolifération des armes.
4.1. Le plaidoyer d’AEFJN pour le contrôle des armes légères
Le plaidoyer d’AEFJN au regard des armes légères se concentre sur trois procédés:
1. L’effort de l'Union européenne dans le domaine du contrôle des exportations de matériel militaire.
2. les progrès accomplis par certains pays africains en vue d'atteindre et d'appliquer les accords sur le contrôle des armes sur une base régionale.
3. le processus en cours à l'Organisation des Nations Unies : le "Programme d'action sur les armes légères" et le Traité du commerce des armes sur toutes les armes conventionnelles.
4.1.1. La Position Commune de l’Union Européenne
La position commune européenne sur l'exportation d'armes et de matériel militaire signé en Décembre 2008 est juridiquement contraignant. Elle représente un pas en avant sur le Code de Conduite adopté en Juin 1998. Elle s'applique à 32 pays (les 27 membres de l'UE, plus la Norvège, l'Islande, le Liechtenstein, la Suisse et le Canada). En 1999, les États-Unis ont approuvé les principes du Code de Conduite de l'UE. En 2003, la Belgique l’a intégré dans sa législation et, en 2007, l'Espagne a fait de même.
AEFJN avec d'autres ONG, a contribué à l'adoption de la position commune comme instrument juridiquement contraignant. Actuellement, AEFJN travaille pour que les états membres adoptent leur législation national à la position Commune de l’UE pour l’export de matériel militaire.
4.1.2. Accords régionaux en Afrique
Ces dernières années, un nombre d’accords régionaux visant le contrôle des armes ont été signés en Afrique :
* Le Protocole de Nairobi sur les armes légères, un instrument juridiquement contraignant adopté en 2004 qui s'applique aux 12 États de l'Afrique centrale et orientale. Le Protocole est entré en vigueur le 5 Mai 2006. [Nbsp] Pendant ce temps, le Centre régional pour les armes légères (RECSA), prévue en elle, a été mis en place.
* La convention ECOSAP, adoptée par la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l'Afrique, qui regroupe 15 pays), le 14 Juin 2006. Elle est le résultat d'un processus entamé avec un moratoire de trois ans sur les transferts et la fabrication des armes légères et de leurs munitions en oeuvre en 1998, renouvelé et désormais transformé en un permanent de la Convention. Il s'agit d'un accord juridiquement contraignant, dont le texte, reconnu comme l'un des plus avancés dans le domaine, a été préparé avec l'assistance de la société civile.
* Dans la Communauté pour le Développement de l’Afrique Australe (SADC), le protocole sur le contrôle des armes à feu, munitions et autres matériels connexes, adoptée en août 2001. Son objectif principal est de prévenir, combattre et éradiquer la fabrication illicite d'armes à feu, munitions et autres matériels connexes. Elle vise aussi à réglementer l'importation et l'exportation des armes légères légales et donc freiner le transit de ces armes vers et à l'intérieur de la région. Le Protocole vise à l'harmonisation des législations nationales dans les États membres sur la région.
4.1.2. Le Traité sur le Commerce des armes (TCA) à l'Organisation des Nations Unies
Après des années de collaboration et de travail entre la société civile et les gouvernements, et de nombreux débats au sein des Nations Unies, enfin, en Octobre 2009, l'Assemblée générale des Nations Unies a convenu d'un calendrier pour établir un traité sur le commerce des armes (TCA) "fort et robuste" avec des «normes communes» pour contrôler les transferts internationaux d'armes classiques.
Actuellement, il n'existe pas de règlement global pour le commerce des armes. La résolution sur le TCA reconnait que les transferts internationaux d'armes contribuent à des conflits armés, des déplacements de personnes, au crime organisé et à des actes terroristes, qui sapent la paix, la sécurité et le développement durable.
Cet accord signifie que le TCA sera négocié dans une série de réunions et sera conclu lors d'une conférence des Nations unies en 2012. On prévoit que le traité qui en résultera demandera aux États de réglementer rigoureusement les transferts internationaux, conformément à des principes fondés sur le droit international, ce qui pourra réduire considérablement les coûts humains associés à la prolifération des armes classiques.
AEFJN se joint à la société civile dans les pays, d’Afrique et d’Europe, pour qu’un traité solide et efficace soit accepté en 2012. Il est vital de maintenir la pression devant les gouvernements pour un traité solide, et de ne pas permettre à une minorité d'Etats de bloquer le processus.